Si la photo ne saurait mentir, compte tenu de son objectivité, elle n’est pas le froid miroir que nous renvoie la technologie. Elle capte avant tout des images habitées, c’est-à-dire, empreintes des sensations ourdies par la main et l’esprit qui les ont générés. Niloufar Banisadr appartient à cette catégorie d’artiste requise par les mirages du réel, qu’elle revisite à sa manière fluide et métaphorique. Rompue aux aménagements structurels et aux manipulations les plus exigeantes, elle n’a pas cédé à l’image de constat, mais a levé une ronde de visions allégoriques, axées sur le mouvement et les incidences de la lumière. En résulte une succession de formes ventilées et de voilages tremblé, où s’immiscent certains symboles du pays au loin. Néanmoins, l’Iran n’est pas le seul objet de la quête d’harmonie de Niloufar, car d’autres fois se profilent des dispositifs géométrisants, dédoublés ou en surimpression, à l’architecture légèrement grillagée, qui déclinent plusieurs angles de perception. Plus avant, entre deux rideaux à rayure ou bien à même le support, s’intercalent deux ballons colorés en suspension, qui à la fois créent des tensions par leur décalage, et portent au rêve en versant du côté d’un surréalisme dans le sillage de Magritte. Sauf qu’ici, ce n’est pas la légende qui importe, mais le talent de la photographe. Au fil de ces séquences signifiantes et contrastées, où l’on sent la maîtrise de l’œil enregistreur, se dégagent une élégance et une justesse dans les cadrages et le rendu iconographique, qui réverbèrent ce qu’il y a d’unique dans une œuvre : la présence. Gerard XURIGUERA